I- Définition: 

On appelle « focalisation » la position qu’occupe un narrateur pour conduire son récit. Pour rappe­ler l’origine scientifique du verbe « focaliser », on peut dire aussi que la focalisation est l’optique sui­vant laquelle les éléments d’un récit sont portés à la connaissance du lecteur. On parle aussi de points de vue narratifs, par exemple celui du nar­rateur ou celui d’un personnage. Il importe de savoir les repérer pour mieux comprendre les textes narratifs.

II- Les différents types de focalisation

  • La focalisation externe (ou le point de vue externe).

Les événements semblent se dérouler devant l’objec­tif d’une caméra qui se contenterait de les enre­gistrer.

Exemple: « Vers la fin du mois d’octobre dernier, un jeune homme entra dans le Palais-Royal au moment où les maisons de jeu s’ouvraient, conformément à la loi qui protège une passion essentiellement impo­sable. Sans trop hésiter, il monta l’escalier du tri­pot désigné sous le nom de numéro 36. » Balzac, La peau de chagrin.

Le lecteur se trouve devant des faits bruts, non accompagnés de jugements ; il n’a pas accès à la pensée du personnage. L’article indéfini « un jeune homme » ne permet pas de connaître son identité.

  • La focalisation interne (ou le point de vue interne).

Le lecteur a l’Impression de percevoir et de juger les choses et les êtres à travers le regard d'un per­sonnage, à travers sa conscience, suivant ses pensées.

Exemple: « Enfin, en prêtant l’oreille, Meaulnes crut entendre comme un chant, comme des voix d’enfants et de jeunes filles, là-bas... », Alain-Fournier, Le grand Meaulnes. Le lecteur partage l'incertitude du personnage dans sa découverte du château. Il ne sait pas plus que lui ce qui en est. On repère la focalisation interne à la présence de verbes de perception (voir, entendre) ou de jugement (croire, penser, se dire).

  • La focalisation zéro ( ou le point de vue omniscient)

C’est l’absence de focali­sation. La perception n’est plus limitée. On appelle aussi ce mode de focalisation le point de vue omniscient, car la réalité est décrite par un narra­teur qui voit tout et sait tout (causes, suites des évé­nements, passé, avenir, pensées des personnages).

Exemple: « Quand tout fut vendu, il resta douze francs soixante et quinze centimes qui servirent à payer le voyage de Mlle Bovary chez sa grand-mère. La bonne femme mourut dans l’année même ; le père Rouault étant paralysé, ce fut une tante qui s’en chargea. [...] Depuis la mort de Bovary, trois médecins se sont succédé à Yonville sans pouvoir y réussir tant M. Homais les a tout de suite battus en brèche. Il fait une clientèle d’enfer ; l’autorité le ménage et l’opinion publique le protège. Il vient de recevoir la croix d’honneur. » Flaubert, Madame Bovary

Le lecteur apprend tout de la destinée de chacun des personnages, partage le regard Ironique du nar­rateur sur l’un d’eux : Homais.

III- Les effets produits par la focalisation

Le mode de focalisation Influe sur la narration que lit le lecteur. Il en résulte des effets différents pour le sens et les enjeux du texte.

  • La focalisation externe

L’effet produit est une sorte de neutralité, d’objectivité, d’absence d’émo­tion. La narration n’oriente pas les réactions du lecteur. Cette modalité est assez rare.

  • La focalisation interne

En exprimant des per­ceptions et des émotions à travers la sensibilité et la subjectivité d’un personnage, ce point de vue narratif permet au lecteur de mieux cerner la psy­chologie du personnage et de mieux le comprendre de l’Intérieur.

Exemple : « On annonça le dîner. Julien, déjà fort mal dis­posé, vint à penser que, de l’autre côté du mur de la salle à manger, se trouvaient de pauvres déte­nus, sur la portion de viande desquels on avait peut- être grivelé pour acheter tout ce luxe de mauvais goût dont on voulait l’étourdir. » Stendhal, Le rouge et le noir.

La focalisation interne crée, entre le lecteur et Julien, une complicité favorisant le phénomène d’identification et le partage des émotions.

  • La focalisation zéro

L’absence de limitation per­met une vision globale, une connaissance « polyphonique » de toutes les données de l’Intrigue ou de la situation évoquée. Elle donne au lecteur l’Impres­sion de dominer le récit, d’avoir les tenants et les aboutissants d’une situation, les clés d’un carac­tère. Ce point de vue « omniscient » garantit au lec­teur le plus grand nombre d’informations : Il est par­ticulièrement efficace dans les romans de type historique ou social comme ceux de Balzac ou de Zola.

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