MÉTHODE DE L'ANALYSE LINÉAIRE
L'explication linéaire permet d'aborder un texte de façon efficace. Elle aide à repérer, analyser et regrouper les éléments qui fondent l'unité du texte. Elle dégage des « hypothèses de lecture » qui seront à la base de l'élaboration du commentaire composé à l’écrit et de la lecture méthodique à l’oral.
Première approche du texte
Le titre, l'auteur, la date
Ces indications sont toujours fournies avec le texte. Si le livre est connu, il est possible de situer le texte dans l'ouvrage et dans l'œuvre de l'auteur. Sinon, le titre, souvent évocateur, peut donner des informations sur les héros ou le thème.
Le premier regard sur le texte
- Un coup d'œil sur la disposition peut permettre d'envisager la nature d'un texte : dialogues, nombre de paragraphes, proportion des paragraphes, changements de caractères, dates, signature.
- Un coup d'œil sur les premiers et les derniers mots peut donner des Indications sur le contenu.
La lecture du texte
- S'il y a narration, se poser les questions suivantes : où cela se passe-t-il ? quand ? combien de personnages ? comment s'appellent-ils ? que font-ils ? que disent-ils ? Résumer l'histoire en une ou deux phrases.
- S'il ne s'agit pas d'une narration, repérer les étapes successives du texte.
L'étude linéaire
Au fil du texte, on se demande constamment ce qui peut être significatif, c'est-à-dire ce qui peut faire l'objet d'un commentaire. Observer chacun des niveaux suivants : le lexique, la syntaxe, les sonorités, les images, les références culturelles.
Lexique |
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Syntaxe |
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Sonorité |
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Images |
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Référence culturelles |
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Tout repérage doit être accompagné de son commentaire ponctuel. Si on ne trouve aucun commentaire, pour donner son sens au repérage, on doit considérer qu'il s'agit d'un repérage non valable, on le passe donc sous silence.
Exemple : La paronomase mère/terre, dans l'exemple ci-contre, est expliquée par « l'universalité de l'expérience ».
Regroupement final
Au cours de l'étude linéaire, on se rend progressivement compte que les observations successives ne sont pas Indépendantes les unes des autres, et peu à peu apparaissent des centres d'intérêt dont chacun correspond à plusieurs commentaires ponctuels. A la fin de l'étude, on rassemble tout ce qui a été expliqué et l'on conclut en mettant en évidence les principaux centres d’intérêt.
Exemple : Dans le texte ci-contre, on peut découvrir l’amour maternel, une image de l’enfance, l’expression de la prière, la formation de l’écrivain.
EXEMPLE DE LECTURE LINÉAIRE
Texte :
« Louange à vous, mères de tous les pays, louange à vous en votre sœur ma mère, la majesté de ma mère morte. Mères de toute la terre, Nos Dames les mères, je salue vieilles chéries, vous qui nous avez appris à faire les nœuds des lacets des souliers, qui nous avez appris à nous moucher, oui, qui nous avez montré qu’il faut souffler dans le mouchoir et y faire feufeu, comme vous nous disiez, vous, mères de tous les pays, vous qui patiemment enfourniez, cuillère après cuillère, la semoule que nous, bébés, faisions tant de chichis pour accepter, vous qui, pour nous encourager à avaler des pruneaux cuits, nous expliquiez que les pruneaux sont de petits nègre qui veulent rentrer dans leur maison et alors le petit crétin, ravi et soudain poète, ouvrait la porte de la maison, vous qui nous avez appris à nous gargariser et qui faisiez reureu pour nous encourager et nous montrer, vous qui étiez sans cesse à arranger nos mèches bouclées et nos cravates, pour que nous fussions jolis avant l’arrivée des visites ou avant notre départ pour l’école, vous qui sans cesse harnachiez et pomponniez vos vilains nigauds petits poneys de fils dont vous étiez les bouleversantes propriétaires, vous qui nettoyiez tout de nous et nos sales genoux terreux ou écorché et nos sales petits nez de marmots morveux, vous qui n’aviez aucun dégoût de nous, vous, toujours si faibles avec nous, indulgentes qui plus tard vous laissiez si facilement embobiner et refaire par vos fils adolescents et leur donniez toutes vos économies, je vous salue, majesté de nos mères. »
Albert Cohen, Le Livre de ma Mère, 1954. Éd. Gallimard (Bac., académie d’Aix-Marseille/Toulouse)
Le titre
Le Livre de ma Mère laisse envisager une œuvre autobiographique (« ma »), mais aussi plus ambitieuse : « Le Livre », c'est le nom de la Bible. D'ores et déjà, deux pistes de recherche peuvent être envisagées : quelle est la part du témoignage personnel ? Quel est le rôle c l’écrivain d’après Cohen ?
Lecture externe au texte
Le texte est compact, dense, aucun paragraphe n’apparaît. En revanche, « Nos Dames » s détache par ses deux majuscules et évoque Notre-Dame, l'église, mais aussi la prière L'abondance des « vous qui » semble aller dans le sens de cette impression (« Notre Dame qui êtes aux deux »...).
Effectivement, Cohen s'adresse aux mères du monde entier pour les glorifier et les remercier de leur infini dévouement envers leurs fils.
Lecture du texte : l'histoire
Le début du texte (« Louange à vous ») et la fin du texte (« majesté de nos mères » confirment cette idée de prière, le pluriel indique que l'auteur dépasse son expérience personnelle.
L'analyse linéaire
La première phrase du texte de Cohen est très courte et s'oppose à l'immense deuxième phrase qui se développe jusqu’à la fin. Cette phrase ne contient pas de verbe, mais possède toutes les caractéristiques de la prière qui est un genre oral : énonciation à la deuxième personne, lexique, répétitions (« louange à vous »), assonances (« louange à vous, mères de tous les pays »), allitérations (« majesté de ma mère morte »). Par la syntaxe, l'auteur met en parallèle son expérience personnelle et l’expérience de l'humanité. Son œuvre se veut universelle.
Commence alors la deuxième phrase, immense. L'idée de prière est confirmée par « je vous salue ». En établissant un lien étroit entre les deux mots « mères / terre », la paronomase souligne encore l'universalité de cette expérience. Le pluriel, les majuscules « Nos Dames », le mot « toute » donne un ton emphatique aussitôt démenti par le calembour « vieilles chéries » (Vierge Marie I). Apparaît alors une nouvelle dimension du texte, l'ironie attendrie (« chéries »).
Ensuite, le texte sera rythmé par l'anaphore « vous qui ». Et, à nouveau, apparaît un contraste entre la solennité de la prière et le contenu trivial « les lacets, les mouchoirs, la semoule », les mots « feufeu », « chichis », d'un registre de langue familier. Le redoublement dans ces mots évoque l'éternelle répétition des tâches maternelles. Le dévouement des mères sera d'autant plus glorifié qu'il est humble et obscur.
EXERCICES POUR MAÎTRISER LA LECTURE LINÉAIRE
Exercice 1 : Écrivez en une phrase ce que vous suggère le titre des romans que vous n'avez pas lus.
- Terre natale (Marcel Arland),
- L’Insurgé (Vallès),
- Tendre bestiaire (Genevoix),
- Le Paysan de Paris (Aragon),
- Romansonge (André Stil),
- Voyage au bout de la nuit (Céline),
- La Légende de saint Julien l’hospitalier (Gustave Flaubert),
- Cela s’appelle l’aurore (Roblès),
- Memory Lane (Modiano),
- Le Journal d’une femme de chambre (Mirbeau),
- Nous (Claude Roy),
- Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ? (Perec).
Exercice 2 : Procédez à une lecture externe de ce texte, puis lisez-le attentivement et rédigez-en un court résumé de une ou deux phrases. Vous pouvez vous aider des mots-clés qui sont en italique.
« ... Enfants, nous ne connaissions guère que les Landes : l’être collectif dénommé “les garçons” et dont je n’étais qu’une parcelle, avait décidé que hors le pays des pins, du sable et des cigales, il n’était pas de vacances heureuses. A peine connaissions-nous la propriété de vignes que plus tard je devais tant aimer. Notre mère assurait que nous n’eussions voulu pour rien au monde du sort des malheureux enfants qui croyaient s’amuser à Royan, à Arcachon ou à Bagnères. Nous en étions nous- mêmes persuadés. Ainsi sont entrés en moi, pour l’éternité, ces étés implacables, cette forêt crépitante de cigales sous un ciel d’airain que parfois ternissait l’immense voile de soufre des incendies ; alors les tocsins haletants arrachaient les bourgs à leur torpeur. Aussi brûlant qu’ait été l’après-midi, le ruisseau appelé La Hure, et ce qu’il traîne après soi de brouillards flottants et de prairies marécageuses, dispensait, le soir, une fraîcheur dangereuse qu’au seuil de la maison nous recevions, immobiles et la face levée. Cette haleine de menthe, d’herbes trempées d’eau, s’unissait à tout ce que la lande, délivrée du soleil, fournaise soudain refroidie, abandonne d’elle-même à la nuit : parfum de bruyère brûlée, de sable tiède et de résine — odeur délicieuse de ce pays couvert de cendres, peuplé d’arbres aux flancs ouverts ; je songeais aux cœurs que la grâce incendie et qui ont choisi de souffrir. C’est pourquoi l’automne dans la lande est un tel miracle : dans bien d’autres pays, l’arrière-saison “fait saigner les feuillages, change en or sombre les fougères ” (ainsi que j’écrivais, dans mes narrations qui avaient l’honneur d’être lues devant toute la classe), mais nulle part elle n’est, comme dans nos landes consumées, une telle libération : les palombes, sous le trouble azur du mois d’octobre, sont le signe qu’est fini le déluge de feu. »
François Mauriac, Commencement d’une vie (Bac., Groupe I)
Exercice 3 : Les mots de cet exercice sont extraits du exte de l'exercice précédent. Répondez aux questions qui vous sont posées.
- « Enfants » : ce mot annonce un thème important. Lequel ? Qu’indique le pluriel ?
- « Landes » : ce mot est associé à « enfants » par deux moyens. Lesquels ? Qu’implique ce rapprochement ? Quel est le nouveau thème amorcé ?
- « dont je n’étais qu’une parcelle » : l’auteur émerge dans le texte de façon indirecte. Pourquoi ?
- « parcelle » : comment Mauriac utilise-t-il la polysémie du mot ?
- « le pays des pins, du sable et des cigales » : quelle est la figure de style employée ? Sur quoi attire-t-elle l’attention ?
- « que plus tard je devais tant aimer » : qu’indique cette proposition sur le déroulement du récit ?
- « Notre mère » : qu’indique l’emploi de la première personne du pluriel ?
- A quoi sert l’évocation des vignes et des stations balnéaires ?
- « les malheureux enfants qui croyaient s’amuser » : quelle est la figure de style employée ? Qu’apprend-on sur la mère ?
- « connaissions/assurait » : qu’indique l’imparfait ?
- « Nous/nous-mêmes/moi » : commentez le changement de personne.
- « Ainsi sont entrés en moi » : comment le changement de temps souligne-t-il le sens du verbe ? Comment l’auteur se situe-t-il par rapport à ses souvenirs ?
- « Entrés/éternité/été » : commentez le rapprochement de ces mots.
- « éternité » : quelle connotation possède ce mot ?
- « crépitante » : quel est le bruit que ce mot désigne d’ordinaire ? Comment l’image « forêt crépitante de cigales » prend-elle une seconde signification ? Quel est le mot qui vient confirmer cette seconde signification ?
- « airain/tocsin » : par quelle figure de style « airain » annonce-t-il « tocsin » ?
- « les tocsins haletants arrachaient les bourgs à leur torpeur » : quel est l’effet de cette personnification ?
- « brûlant » : à quel réseau lexical déjà repéré rattachez-vous ce mot ?
- Comparez la phrase qui commence par « Ainsi » et celle qui commence par « Aussi ».
- Arrivé au milieu du texte (ligne 15), faites un premier bilan. L’observation des pronoms doit vous permettre de dégager deux parties dans le passage analysé.
Exercice 4 : Voici le début et la fin de textes donnés au baccalauréat. Quelles informations sur le contenu et la nature du texte pouvez-vous en dégager ? N'oubliez pas de vous référer au titre et à l’auteur.
Début : « De seconde en seconde, les éjections perdaient de leur violence, les rugissements de leur intensité. »
Fin : « Tout était maintenant somptueux, étale, presque paisible. »
Haroun Tazieff, Niragongo ou le volcan interdit
Début : « Quel pays ! l’envahisseur le dote de villas et de garages, d’automobiles, de faux “mas” où Ton danse. »
Fin: « — garde-moi... »
Colette, Provence, garde-moi
Début : « Derrière moi, debout, se tenait Balandran. Je me levai et nous nous regardâmes en silence. »
Fin : « Je lui dis : « C’est vous, Balandran ? »
Il me dit : « C’est moi Balandran, Monsieur Martial. »
Henri Bosco, Malicroix
Début : « J’entends Théodecte de l’antichambre ; il grossit sa voix à mesure qu’il s’approche. »
Fin : « Je cède enfin et je disparais, incapable de souffrir plus longtemps Théodecte et ceux qui le souffrent. »
La Bruyère, Les Caractères
Début : « Je suis comme ceux qui s’endorment, comme les enfants. Je m’affaiblis, je m’adoucis, je ferme les yeux ; je rêve à la maison. »
Fin : « Où suis-je ? Où est Marie ? Et même qu’est-ce qu’elle est ? Je ne sais pas, je ne sais pas. J’ignore la blessure de ma chair, et est-ce que je sais la blessure de mon cœur ? »
Henri Barbusse, Clarté
Exercice 5 : A la suite du poème ci-dessous, des indications de repérage sont données vers après vers. Faites les commentaires ponctuels correspondant à chaque repérage.
La tortue et les deux canards
« Une tortue était, à la tête légère,
Qui, lasse de son trou, voulut voir le pays.
Volontiers on fait cas d’une terre étrangère,
Volontiers gens boiteux haïssent le logis.
Deux canards, à qui la commère
Communiqua ce beau dessein,
Lui dirent qu’ils avaient de quoi la satisfaire :
« Voyez-vous ce large chemin ?
Nous vous voiturerons, par l’air, en Amérique,
Vous verrez mainte république,
Maint royaume, maint peuple, et vous profiterez
Des différentes mœurs que vous remarquerez.
Ulysse en fit autant. » On ne s’attendait guère
De voir Ulysse en cette affaire.
La tortue écouta la proposition.
Marché fait, les oiseaux forgent une machine
Pour transporter la pèlerine.
Dans la gueule en travers on lui passe un bâton.
« Serrez bien, dirent-ils, gardez de lâcher prise. »
Puis, chaque canard prend ce bâton par un bout.
La tortue enlevée, on s’étonne partout
De voir aller en cette guise
L’animal lent et sa maison,
Justement au milieu de l’un et l’autre oison.
« Miracle ! criait-on. Venez voir dans les nues
Passer la reine des tortues.
— La reine ! Vraiment oui. Je la suis en effet ;
Ne vous en moquez point. »
Elle eut beaucoup mieux fait
De passer son chemin sans dire aucune chose ;
Car, lâchant le bâton en desserrant les dents,
Elle tombe, elle crève aux pieds des regardants.
Son indiscrétion de sa perte fut cause.
Imprudence, babil, et sotte vanité,
Et vaine curiosité,
Ont ensemble étroit parentage :
Ce sont enfants tous d’un lignage. »
La Fontaine, Fables
Indications de repérage
V. 1 |
la rupture de construction |
V. 2 |
l’emploi de « trou » |
v. 3 |
l’emploi de « on » |
v. 4 |
l’organisation syntaxique de la phrase |
v. 5 |
l’emploi du mot « la commère » |
v. 6 |
l’emploi de l’adjectif « beau » |
v. 7 |
la cacophonie « qui... quoi » |
v. 9 |
le choix de l’Amérique |
v. 11-12 |
les deux mots à la rime |
v. 13-14 |
la référence à Ulysse |
v. 15 |
le changement de temps |
v. 16 |
l’emploi de « pèlerine » |
v. 19 |
la redondance |
v. 21 |
l’emploi de « enlevée » |
v. 24 |
le rythme heurté |
v. 25 |
l’emploi de « les nues » |
v. 27 |
la redondance |
v. 28 |
le conditionnel dès la reprise du narrateur |
v. 31 |
le changement de temps |
v. 32 |
le changement de temps ; l’inversion du complément |
v. 33-34 |
pourquoi ces traits de caractère ? |
v. 36 |
la valeur de l’image. |
Exercice 6 : Dites en une phrase ce que décrit ce texte. Comment est organisée cette description ? Comment apparaît le personnage narrateur ? Le premier et le dernier mot évoquent une image, laquelle ? En vous appuyant sur cette image ainsi que sur les mots « vie » et « avenir », dites quel est le centre d'intérêt du texte.
« Fendant la double file des immenses édifices étagés en tuyaux d’orgue très divers de hauteur, de forme et de matière, les grandes avenues toutes droites que baigne la tendre lumière de la belle saison un peu moite s’enfoncent à perte de vue, coupées perpendiculairement par de moindres artères et si longues, dirait-on, que pour les suivre jusqu’au point extraordinairement éloigné où se clôt la perspective il faudrait avoir toute une vie devant soi. Voies new-yorkaises à l’image ambiguë de l’avenir, pour l’œil étrave. »
Michel Leiris, Le Ruban au cou d’Olympia. Éd. Gallimard
Exercice 7 : Le texte suivant décrit la mer effaçant les empreintes de pas sur le sable.
Comment se justifie l'absence de ponctuation ? Pourquoi n'y a-t-il pas de verbe principal, mais beaucoup de participes présents ? Quels sont les mots qui expriment la fragilité ? Le texte tout entier peut être considéré comme une métonymie. Commentez-la. Quelle représentation de la femme implique-t-elle ?
Quel rôle joue le mot « puis » dans la progression du texte ?
Quel centre d’intérêt pouvez-vous dégager ?
« (...) empreintes de leurs pieds nus en forme de guitare molle allongée étranglée en son milieu couronnée par les marques des cinq orteils perles en creux d’une faible concavité quelquefois à peine marquées plus profondes toutefois pour celle qui avait marché le plus près de l’eau dans le sable plat humide, les contours des empreintes alors très nets formant de petites falaises s’effritant parfois minuscules éboulis, puis les traces disparaissant sur plusieurs mètres lorsqu’une vague plus forte s’était étalée les effaçant complètement d’autres fois elles restaient encore visibles mais comme érodées imprécises cuvettes à demi comblées les bords mous arrondis un peu d’eau persistant parfois achevant de disparaître bue »
Claude Simon, La Chevelure de Bérénice. Éd. Minuit
Exercice 8 : Abordez le texte ci-dessous par une rapide lecture externe. Puis, commentez les mots en italique. Regroupez ensuite vos remarques suivant ces entrées :
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Mouvement haut/bas |
sons, lumière, toucher |
création |
lexique : verbes, substantifs, adverbes, adjectifs |
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sujets |
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longueur des phrases |
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temps / comparaisons |
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Magique magie
« Tout à coup, sans qu’un mot eût été prononcé, Bolbina éleva les mains et, de ces mains, prirent merveilleusement leur essor sept boules de métal, douces et fluides, qui montaient, tombaient, remontaient avec une lenteur prestigieuse, cependant que, les bras très largement ouverts, le jongleur admirait de toute son âme, sur son pâle visage incliné en arrière, leur docilité. Soudain du bout des doigts jaillirent sept étoiles de verre qui s’élevèrent à leur tour en se glissant entre les boules, dans l’orbe de ce monde chimérique. Or ce monde tournait silencieusement comme eussent tourné dans le ciel sept astres et leurs sept planètes, en étincelant sur cet homme qui, par moments, semblait ne pas croire au miracle et paraissait épouvanté. De ces mains délicates et aimantées les boules et les étoiles s’échappaient, aussi légères que des plumes blanches et, décrivant à la faveur des facilités de l’espace leurs courbes élastiques, elles effleuraient, au sommet de la course, un point toujours fuyant, d’où sans hâte elles retombaient pour se fondre à nouveau et se charger de force ascensionnelle dans la paume sensible du magicien. De temps à autre, il poussait un soupir de fatigue. Ses yeux, écarquillés tour à tour de crainte et d’espoir, charmaient la matière infidèle par l’innocence de ses constructions inutiles et prestigieuses. Et la matière obéissait. Peu à peu elle s’allégeait jusqu’à ne plus laisser dans l’air que des formes volantes : et alors le jongleur ne semblait plus les voir, mais les écouter. Du bout de ces dix doigts nerveux, il caressait les forces qui descendent dans l’ombre du rayonnement lointain des étoiles pour faciliter leur tâche aux jongleurs. »
Henri Bosco, Antonin. Éd. Gallimard (Bac., Aix-Marseille)
Exercice 9 : Procédez à une première approche du texte ci-dessous à l'aide des indications données. Passez à l'étude linéaire en vous attachant plus particulièrement aux mots en italique. Précisez comment s'articulent les deux moments du poème.
« Seuls, dans leur nid, palais délicat de bambous,
Loin des plages, du spleen, du tapage des gares
Et des clubs d’électeurs aux stupides bagarres,
Ils s’adorent, depuis Avril, et font les fous !
Et comme ils ont tiré rideaux lourds et verrous
Et n’ont d’autre souci, parmi les fleurs bizarres,
Que faire chère exquise, et fumer tabacs rares
Ils sont encore au mois des lilas fleurant doux,
Cependant qu’au dehors déjà le vent d’automne
Dans un “de profundis” sceptique et monotone
Emporte sous le ciel par les brumes sali,
Les feuilles d’or des bois et les placards moroses
Jaunes, bleus, verts fielleux, écarlates ou roses,
Des candidats noyés par l’averse et l’oubli. »
Jules Laforgue, Les Amoureux
Exercice 10 :
-
A la suite du texte de Racine, des indications sont données, vers à vers, pour guider l'explication linéaire de la tirade d'Andromaque. Aidez-vous de ces indications pour faire l'étude linéaire de la tirade.
-
Procédez vous-même à l'étude de la réplique d'Hermione.
-
Quels sont les centres d'intérêt de ce passage ?
Texte
La Troyenne Andromaque est la captive du Grec Pyrrhus, qui en tombe amoureux. Rendu furieux par son refus, il décide de livrer la fille d’Andromaque aux Grecs, qui veulent sa mort. Et de dépit il promet le mariage à Hermione, qu’il n’aime pas mais qui l’aime. Hermione exulte, mais elle aperçoit Andromaque et tente de l’éviter.
Andromaque
“Où fuyez-vous, Madame ?
N’est-ce pas à vos yeux un spectacle assez doux
860 Que la veuve d’Hector pleurante à vos genoux ?
Je ne viens point ici, par de jalouses larmes,
Vous envier un cœur qui se rend à vos charmes.
Par une main cruelle, hélas ! j’ai vu percer
Le seul où mes regards prétendaient s’adresser :
865 Ma flamme par Hector fut jadis allumée ;
Avec lui dans la tombe elle s’est enfermée.
Mais il me reste un fils. Vous saurez quelque jour,
Madame, pour un fils jusqu’où va notre amour ;
Mais vous ne saurez pas, du moins je le souhaite,
870 En quel trouble mortel son intérêt nous jette,
Lorsque de tant de biens qui pouvaient nous flatter,
C’est le seul qui nous reste, et qu’on veut nous l’ôter.
Hélas ! lorsque lassés de dix ans de misère,
Les Troyens en courroux menaçaient votre mère,
875 J’ai su de mon Hector lui procurer l’appui :
Vous pouvez sur Pyrrhus ce que j’ai pu sur lui.
Que craint-on d’un enfant qui survit à sa perte ?
Laissez-moi le cacher en quelque île déserte ;
Sur les soins de sa mère on peut s’en assurer,
880 Et mon fils avec moi n’apprendra qu’à pleurer.
Hermione
Je conçois vos douleurs ; mais un devoir austère,
Quand mon père a parlé, m’ordonne de me taire.
C’est lui qui de Pyrrhus fait agir le courroux.
S’il faut fléchir Pyrrhus, qui le peut mieux que vous ?
885 Vos yeux assez longtemps ont régné sur mon âme.
Faites-le prononcer : j’y souscrirai, madame.”
Indications pour l'étude linéaire
- 858 Ton d’Andromaque. Pourquoi lui dit-elle « fuyez- vous ? »
- 859 « doux » : pourquoi Andromaque emploie-t-elle ce mot ?
- 860 Qui est « la veuve d’Hector ? » Pourquoi cette périphrase ? Pourquoi dit-elle « à vos genoux ? »
- 861 La place de l’adjectif. Pourquoi Andromaque apporte-t-elle cette précision ?
- 862 Quel mot rappelle l’idée du vers précédent ? Quelle expression précédente rappelle la proposition relative et pourquoi Andromaque insiste-t-elle sur cette idée ?
- 863 Repérer la synecdoque (voir p. 33) : quel effet produit-elle ? Le rythme du vers : qu’en déduire ?
- v. 864 La longueur des mots, ce qu’ils mettent en valeur,
- 865 Einversion et sa valeur. Le sens de « flamme »,1a tradition à laquelle ce terme se rattache,
- v. 866 Rythme du vers (longueur des membres de phrase).
- 867 Que laisse prévoir le « mais » ? La valeur de la ponctuation. Le pronom personnel : pourquoi Andromaque parle-t-elle d’Hermione ?
- 868 La répétition de mots : sa raison d’être. Pourquoi cette première personne pour l’adjectif possessif ?
- 869 A quoi sert la restriction du deuxième hémistiche ? Comment « souhaite » est-il mis en valeur ?
- 870 La place de mortel,
- 869-872 Le rythme de la phrase,
- 873 A quoi fait référence cette période de dix ans ?
- 874 « Votre mère » : de qui s’agit-il ?
- 875 Quel sentiment Andromaque veut-elle maintenant éveiller chez Hermione ? Est-ce habile ?
- 876 Construction de la phrase,
- 877 Quel est le nouvel argument d’Andromaque ?
- 878 Quel est maintenant le ton ?
- 879 Le terme qui termine chaque hémistiche,
- 880 Que pouvait-il apprendre d’autre ?