Le Misanthrope de Molière : résumé de la pièce
Acte I
Alceste, blessé par l’hypocrisie sociale, reproche à son ami Philinte sa complaisance mondaine. Ce misanthrope doit de plus soutenir un procès dont l’issue devrait lui être favorable, mais que la cabale peut retourner. Son ami Oronte sollicite alors son avis sur un de ses sonnets et, comme Alceste lui dénie tout talent, une querelle éclate entre les deux hommes.
Acte II
Alceste reproche ensuite à Célimène sa civilité envers ses rivaux. Arrivent deux « petits marquis » avec lesquels Célimène se moque cruellement des absents. Alceste, qui intervient, se voit lui aussi publiquement raillé. Il est alors convoqué par le tribunal au sujet de sa querelle avec Oronte.
Acte III
Les deux marquis s’engagent à se laisser réciproquement la place, selon le choix de Célimène. Arsinoé vient ensuite reprocher à celle-ci son train de vie ; rabrouée, elle propose alors à Alceste une preuve de la duplicité de Célimène.
Acte IV
Éliante aime Alceste, et Philinte aime Éliante, si bien qu’Alceste, humilié par une lettre de Célimène à Oronte, se tourne vers Éliante. Mais Célimène nie sa perfidie et, en jouant sur l'amour d'Alceste, retourne la situation. Des nouvelles inquiétantes arrivent sur l’issue du procès.
Acte V
Alceste l’a en effet perdu ; il décide alors de quitter la compagnie des hommes. En présence d’Oronte, il force Célimène à choisir entre eux deux. La confusion de Célimène s’accroît avec l’arrivée des marquis, possesseurs de lettres dans lesquelles elle ridiculise ses soupirants. Tous la quittent en la raillant ; seul Alceste demeure. En signe d’amour, il lui demande de l'accompagner dans son désert, mais Célimène refuse. Avant de partir, Alceste approuve l’union de Philinte et d'Éliante.
Analyse du Misanthrope
► Le personnage d'Alceste
Certaines précisions historiques, apportées par des spécialistes de Molière, permettent de mieux situer le personnage du misanthrope dans le contexte de son époque. Tout d’abord, l’explication physiologique du comportement d’Alceste, donnée à plusieurs reprises par les personnages qui le qualifient de malade et de fou, était fréquente dans un temps où les hommes étaient définis selon leur appartenance à l’une des quatre humeurs fondamentales : le sang, la pituite ou le flegme, la bile, et enfin la bile noire ou mélancolie. Or le sous-titre de la pièce qualifie Alceste d'atrabilaire, état qui est une des conséquences de l’excès de bile, et cette précision se retrouve dans des notations comme « humeur noire », « noir chagrin », etc. Ce déséquilibre humoral dont est victime Alceste expliquait à l’époque son comportement agressif et dépressif. On a pu à ce sujet établir un parallèle entre l’humeur d'Alceste et celle de Molière, ce dernier étant lui aussi victime d'hypocondrie. Un autre rapprochement fait des difficultés rencontrées par Molière à cette époque la cause de la misanthropie d’Alceste : querelle violente du Tartuffe, étouffement du Dom Juan, menace de mort, attaque contre sa vie privée, et notamment contre son amour pour une femme plus jeune, ont pu nourrir le ressentiment exprimé par Alceste.
► Misanthropie et hypocrisie
La misanthropie d’Alceste lui permet de faire éclater le pacte sur lequel repose la société. En effet, cette hypocrisie qu’il dénonce n’est que l’aspect négatif d'un souci de plaire et d’une flatterie perçue comme art de vivre. Dénoncer l'hypocrisie, ce principe fondateur à l'époque des salons et de la galanterie, c’est s’exclure automatiquement et volontairement du monde. Cette même haine destructrice pousse Alceste aux confins mêmes de son endurance : il se dit amoureux de Célimène malgré sa coquetterie, mais ne serait-il pas amoureux d’elle précisément à cause de cette coquetterie, qui lui permet de haïr ce qu’il chérit et de se déchirer lui- même dans cette contradiction ? En aimant celle qui provoque le désir sans jamais l’assouvir, qui vit par le regard et la flatterie continuels des autres, il choisit celle qui est la plus éloignée de son souci d’authenticité et d’immédiateté. En cela, il cherche la femme la plus capable de détruire son reste d’attachement au monde.
► Fonctions du comique dans Le Misanthrope
Et c’est par cet amour qu’Alceste se rend ridicule et empêche son discours moral d'avoir une portée sociale. Décrit par certains comme un héros, il ne peut cependant s’ériger en norme du fait de ses contradictions, et le rire est le premier châtiment à venir sanctionner ce déséquilibre. Par la moquerie, Molière permet aux autres personnages de ne pas se laisser complètement détruire par Alceste : lui aussi est ridicule, et s’il dénonce quelques hypocrisies, la société le lui rend bien, en lui refusant le statut de sage unique. Comme le dit le flegmatique Philinte :
Et c’est une folie à nulle autre seconde
De vouloir se mêler de corriger le monde (v. 157-158).
Faut-il voir là un éloignement, de la part du dramaturge, à l’égard de l’utilité politique de la comédie soulignée à l'envi depuis l’Antiquité ? Car, si le personnage vertueux se moque autant qu'il est moqué, qui détient alors le pôle de vérité permettant à la comédie d’orienter le spectateur ? En refusant ainsi de conférer à un personnage l’apanage de la morale, Molière semble moins renoncer à l'efficace de sa comédie qu’en complexifier la portée, en refusant de faire d’une instance unique le pôle de référence absolu : au spectateur d’en tirer les réflexions qui lui semblent idoines.
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